Rêver la « Ducati vita », c’est l’adopter.

Ducati, pour moi, c'est la classe à l'italienne. Une moto rageuse et rouge. Une poignée
faite pour être tournée d'un geste sec tandis que son échappement rugit comme un lion en
cage. Rien que d'en parler, j'en ai les poils aux garde-à-vous. La dolce vita. La vraie.
Le mois dernier, Ducati et Moto Journal ont organisé un concours, le “Design Monster” : nous avions jusqu’au 10 novembre pour soumettre un dessin d’une prépa sur base de Monster accompagné d’une description d’au moins 1500 signes et d’une photo. Avec Cigalou à la plume, ma frangine à l’appareil photo et myself au crayon, nous avons tenté le pari de la classe à l’italienne, des virolos au rythme endiablé de son bi-cylindre et de la petite touche française qui relève l’ensemble …
Admettons que de mon Alsace natale, c'est sur les routes sinueuses de la Côte d'Azur que je m'imagine à son guidon, un œil sur la route, un autre sur les flots bleus méditerranéens. Partir de Toulon et rouler jusqu'à Naples, humant à plein nez l'air chaud chargé des fragrances du Sud. Rien à voir avec l'usine de choucroute locale. Je me vois descendre la promenade des anglais, les demoiselles en fleurs se retournant sur mon passage. Car au-delà du sport, Ducati, c'est des motos de charme, de celles qui font même rêver le néophyte. Elles ont ce petit quelque chose en plus. Ce détail qui fait que ce ne sont pas juste de belles bécanes. Ce sont des Ducati.
Sauf que j'habite Strasbourg, que c'est l'hiver et qu'il pleut. Parfois, quand personne ne fait attention à moi, je me glisse furtivement dans le garage du paternel. Là, sous une bâche, se cache sa Monstro piaffant dans l'attente des beaux jours. Maintenant que j'ai mon papier rose tout frais en poche, je me dis que je m'évaderais bien quelques semaines en direction de cette fameuse côte. Alors je m’assois sur la caisse à outils et je laisse mon esprit voyager. Je me fais des listes mentales de tous les accessoires d'aventurier à prendre avec moi pour ce grand road trip. Sans oublier mes cartons à dessin et mes crayons. Mince, mais ma Ducati ne ressemblera plus à rien avec tout mon barda de voyageur ! Il me faut trouver une solution, j'ouvre les yeux et je commence à griffonner sur un bout de papier une Monstro baroudeuse.
Il me faut une bagagerie qui au lieu de l'enlaidir, devienne l'écrin de ma machine. L'avantage des rêves, c'est qu'ils n'ont aucune limite. Je choisis donc de confier à un grand couturier français le soin de me confectionner une belle paire de valises sur mesure. Quelle élégance… Afin d'harmoniser l'ensemble – et d'avoir mon polaroid à portée de main – j'ajoute une sacoche de réservoir avec les mêmes motifs. Ce couturier, qui est du genre taquin, ajoute à une des valises une extension pour porter un club de golf. « Tu en auras besoin si tu passes par Monaco », qu'il me dit. Après tout, pourquoi pas ? Et puis je pourrai y plier mon chevalet en plus. Bien sûr, tout est démontable en quelques secondes. Respectant l'ADN de la Monstro, j'associe ce qu'il y a de plus élégant avec les dernières avancées technologiques en la matière. Mais, entre nous, je laisse tout mon attirail sur la moto. Un écrin, je vous dis.
Doucement, ma main a lâché mon crayon et je me suis assoupi la tête posé sur l'établi. Je me vois, assis à la terrasse de ce café digne d'une pièce de Pagnol, éreinté après trois journées de petites routes – je suis passé par les Alpes – avalées à pleine vitesse. Je sirote un cocktail façon James Bond en savourant sur mon visage les derniers rayons d'un soleil s'effaçant petit à petit derrière la mer, là-bas, à l'horizon. La lumière aux tons orangés qui se dégage de cette scène fait ressortir les courbes de ma Monstro H-T (comme Haute-
Couture). Une étudiante en goguette flâne sur la plage pieds nus, balançant nonchalamment ses tropéziennes au bout de ses doigts. Ses yeux sont aussi bleus que l'eau qui s'étend à nos pied. Elle s'arrête devant ma machine et la regarde longuement. Puis, elle semble me chercher parmi les flâneurs savourant leur apéro à l'ombre de la treille. Elle me voit et me désigne son sac-à-main aux mêmes motifs que ma sacoche de réservoir. Elle sourit. Je lui souris en haussant les épaules. Elle rit.
« Je vous offre un verre ? »

Pour visualiser les projets des 50 autres participants : Galerie du concours